Quand l’espoir nous déserte – L’AMAZONE

Préambule – L’Amazone – Tome 1

L’adieu aux espoirs (L’Amazone, Préambule)

Je continuais de courir droit devant en espérant trouver un recoin pour nous replier. Il faisait nuit noire et nous nous prenions les pieds dans les buissons et autres obstacles de notre parcours. Michelle m’aidait à soutenir Samuel, autant que possible. Sa blessure à la cuisse n’annonçait rien de réjouissant. L’espoir n’était plus. Pourquoi avait-il fallu qu’il s’interpose entre cette lame et moi pour me servir de bouclier. Si mon temps était résolu, alors il fallait me laisser partir. Un bruit guttural provenant de Samuel me ramena à la situation et sa douleur. J’aurais aimé lui cacher la gravité de son état mais il n’était pas dupe et je le savais. Il était assez aguerri pour évaluer l’état de sa jambe et même si cela n’avait pas été le cas, il l’aurait lu dans mon esprit. Cette proximité n’avait pas que du bon.

Michelle était à bout de souffle. Je me demandais comment elle trouvait encore les ressources nécessaires pour fuir et avancer avec les tortures mentales que lui avaient affligées « nos frères ».

– « Michelle, je t’en prie, scanne le terrain et trouve-nous un recoin », soufflai-je, désespérée.

Je sentais que notre fin était proche. Perdre Samuel était la seule chose qui m’effrayait. Quitte à partir, je voulais le faire avant lui. « Mon jumeau d’une autre mère », comme nous aimions nous appeler. Nous avions décidé de prendre la fuite avec Michelle et deux de nos frères en apprenant les desseins du reste du Conseil. Nos dons ne serviraient pas à ces projets. C’était d’une ignominie sans nom. Nous étions censés élever les hommes, apporter notre pierre à l’édifice et non pas nous servir de nos capacités pour asseoir notre supériorité, tels des mercenaires sans vergogne. Mais sur notre petit groupe de rebelles, nous avions déjà perdus Matthew et Hiroto. Matthew avait été le dernier capturé. Hiroto était mort dans les bras de Samuel. En lisant son esprit, j’ai pu entendre les derniers mots qu’il avait adressé à mon jumeau. « Ce qu’elle prépare est pire ». Mais il n’eut pas le temps de nous en dire plus. Samuel et moi n’en étions que plus inquiets.

– « Je ne vois plus rien, Emily. Ils ont dû contacter l’ordre et passer un accord avec eux pour me destituer. Tu vois bien que ma lueur faiblit… on est fichu. »

Sa voix se brisa dans un sanglot que l’effort physique dissimulait presque. Elle était éreintée mais surtout désespérée. Je comprenais enfin que notre heure était venue.
– « N’essaie même pas de me le cacher. Même si j’ai l’air inconscient je suis avec toi. »

La voix de Samuel résonnait dans ma tête. Surprise, je jetai de nouveau un coup d’œil pour voir sa tête balloter dans le vide pendant que nous continuons notre sprint en le trainant avec nous. Je sentais sa force vitale partir. Mon corps avait l’impression de se noyer, de s’étouffer. Il ne pouvait plus y avoir de lendemain sans lui à mes côtés. Nous étions un tout, une force de frappe incroyable et impitoyable lorsque nous étions ensemble. Il n’était pas mon amant, il était plus que ça. Il était mon tout.

– « Je ne vois pas comment ils peuvent faire ça. Techniquement… »
Mon souffle ressemblait désormais à un râle. Mes forces me quittaient. Ces jours de combat et l’accumulation de toutes ces blessures avaient raison de moi. Jamais je ne m’étais sentie aussi faible, aussi proche de la fin.

– « Utilise tes derniers dons pour nous trouver un coin où nous replier quelques minutes », repris-je.

–  « Quelques minutes ? », s’étonna Michelle.

–  « Fais-le », lui ordonnai-je dans un cri de désespoir. « Foutus pour foutus, on va passer le flambeau proprement ».
Elle comprit enfin ce que je voulais dire. Elle comprit que nous vivions objectivement nos dernières minutes. Si la conception commune de grandeur de notre mission, qui nous avait initialement rapprochés, avait encore un sens pour elle, alors nous allions protéger nos réincarnations pour continuer notre combat.

La chute des astres (L’Amazone, Préambule)

Elle ralentit brusquement pour se concentrer et fermer les yeux. Je ralentis le rythme, ne pouvant trainer Samuel seul. Il dut le sentir car il reprit faiblement ses esprits. D’un signe de tête, elle me montra un bosquet trente mètres plus bas. Je suivis la direction sans me poser de question. Derrière ce bosquet, un renforcement dans la pierre nous permettait de nous poser. Sans plus attendre, elle s’activa en cherchant quelque chose dans son sac. De grosses larmes roulèrent sur ses joues. Elle se préparait à tracer sa propre fin mais non l’épilogue de sa mission. Samuel, la tête posée sur mes genoux, ouvrit faiblement les yeux en tentant de comprendre ce que nous faisons et où nous nous trouvions. Ma main ensanglantée caressait son visage pour le rassurer. Comprenant ce que nous allions faire, il me rendit ce geste et souffla :

– « J’ai aimé chaque seconde de ma vie avec toi, ma jumelle. Notre vie n’aurait pu être plus grande. »

Je ne pouvais retenir mes larmes face à cette vérité. Elles s’écrasaient sur son visage qui se faisait pourtant plus serein. Michelle sortait des morceaux de toile de jute de son sac, ainsi que des petites bobines de fils. Pourpre, blanc et argent. Je ne connaissais que trop la signification du pourpre. Ces fils mettraient fin à notre destinée. Sans s’arrêter, elle enchaînait les incantations en posant sa main sur trois morceaux de jute quasi vierges. Seul un fil d’or était brodé sur ces derniers. Je ne pus m’empêcher de lui poser la question fatidique.

– « Qui sont-ils ? »

–  « Chut, … des inconnus pris un peu au hasard avant de partir », s’agaça-t-elle.

–  « Mais comment vont-ils se retrouver ? », m’inquiétai-je.

–  « Laisse-moi finir, nous n’avons que peu de temps… »

Son exaspération se calma un quart de seconde en lisant la crainte sur mon visage.

– « Ils se retrouveront, j’ai pris avant de partir des pièces sur lesquelles je travaillais. Une de mes dernières prémonitions étaient de les prendre avec moi. Ils seront protégés car ils font partie d’un ordre ancestral qui nous est cousin. J’ai choisi des enveloppes plus fortes pour les nôtres, avec des liens solides. Ils seront à l’abri le temps de grandir et comprendre les enjeux et leurs devoirs. »

Je hochai inconsciemment de la tête, pas très sûre de ce que cela voulait dire. Michelle se mettait à broder frénétiquement sur les différents canevas. Elle associait ces pièces avec des canevas plus riches en couleurs qui devait être les nôtres. Elle filait sans relâche. Quand elle eut fini de les unir, elle posa sa main sur le tas de jute. Une lueur argentée sortie de sa paume au moment où elle récita une incantation d’une voix plus caverneuse. Cette dernière devait lui prendre beaucoup d’énergie car les veines se firent plus visibles sur ses tempes et sa main se crispait autant que ses mâchoires. L’acte ne dura que quelques secondes en soi, mais lorsqu’elle ouvrit les yeux, ces derniers étaient vidés de leur force vitale. De son autre main, elle fouilla dans son sac et en ressortit une lame. Elle regarda tristement le tas de canevas. Les plus anciens voyaient l’extrémité de leur fil se teindre subtilement mais sûrement de rouge. Ma première idée se confirmait : il s’agissait des nôtres. Michelle s’affaiblissait de secondes en secondes.

– « Faites vos adieux. Il faut que ce geste soit accompli de notre propre main pour que l’incantation fonctionne », souffla Michelle.

Un suicide. Jamais je n’aurais pensé à cette fin.
Dans un dernier effort, elle enterra les canevas pour qu’ils ne tombent pas entre leurs mains. Elle recouvrit la terre fraiche de feuillage et de pierres, essayant de rendre ce camouflage le plus discret et naturel possible.
Je fis glisser une lame à double tranchant de ma ceinture. Samuel qui avait compris la démarche, tira fébrilement une lame de l’arrière de sa ceinture.

– « Michelle, cela a réellement été un honneur de combattre à tes côtés. Merci pour ton aide, pour ta droiture, … pour cette fin. Que notre combat continue après nous. »

Les larmes reprirent leur tracé sur mon visage. Les pas de nos assaillants commençaient à résonner.

– « Je n’aurais jamais cru que mon destin allait s’associer un jour avec des lueurs blanches. Merci de m’avoir donné de l’espoir. »

Je tendis la main pour presser la sienne en signe de gratitude, puis me retourner vers Sam. Les sanglots rendaient difficile mon élocution mais il devait l’entendre à défaut de le lire dans mes pensées.

–  « Je n’arrive pas à croire ce que nous nous apprêtons à faire… Tant que tu étais à mes côtés, aucune situation ne me paraissait sans issue. »

–  « Je ne serai jamais resté dans cette vie sans toi, Em’. Merci pour ce voyage… Aie confiance, mon âme retrouvera la tienne. C’est écrit depuis la nuit des temps. »

–  « Sam… »
Mes mots furent attirés par un geste vif perçu du coin de l’œil. Sam et moi tressaillirent malgré notre état d’épuisement et les blessures affligées. Michelle s’était rentré la lame dans la carotide. Évidemment. La mort n’en serait que plus rapide. Se couper les veines aurait pris trop de temps et vu la distance à laquelle ils se trouvaient, ils auraient pu encore nous sauver et nous emprisonner jusqu’à ce que l’on plie. Michelle s’étouffait, convulsait sous la douleur et il nous fallut un effort surhumain pour refreiner notre envie de lui porter secours. Et un effort plus grand encore pour faire abstraction de la peur qui nous étreignait. Je regardais Sam d’un air entendu. Il était tellement fatigué… Mes yeux étaient embrouillés de larmes. Ce geste demandait un cran que je n’étais pas sûre d’avoir. Mais pour la mission que l’on s’était donnée, nous devions le faire. Il n’y avait pas d’autres voies possibles. Les cris des traqueurs se rapprochaient. Ils nous avaient repérés. Je serrai la main libre de Sam tandis que je pointai la lame près de ma gorge. Il faisait de même. Les larmes coulaient également de ses yeux. Je connaissais tout de ses pensées, de ses peurs, de ce qui avait été ses espoirs pour notre race. Encore une fois, nous étions au diapason pour les premières.

– « Un », murmura Sam, décidé. Aucun de nous ne flancherait.

– « Deux… », continuai-je, en l’imitant.
Ce mimétisme se poursuivit dans notre dernier geste.

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L’Amazone – Roman Fantasy – Faits et fiction

La fiction que j’écris sur les Amazones, Valkyries et Atalantes se base sur certaines croyances mais également des faits repris par des historiens. Je ne manquerai pas de vous partager certaines sources pour ceux qui se prennent au jeu de ces guerrières et souhaitent apporter un autre regard à leur histoire et leurs légendes. Les Amazones et les Walkyries sont des guerrières qui ont été représentées dans l’histoire et la fiction. Les Atalantes sont peu connues à ce jour mais représentent elles-mêmes une caste de guerrière dont le nom est repris d’une héroïne grecque. Amazones, Walkyries et Atalantes partagent beaucoup de similitudes, mais affichent également quelques différences.

Où vivent les Amazones?

Certaines Amazones provenaient d’une tribu mythique de femmes guerrières qui vivaient au pays de l’Amazonie dans la région de la mer Noire. Dans certains écrits, leur origine se fait plus spécifique et place leur berceau de naissance en Scythie. L’amazone est connue pour leur talent d’archers et leur courage au combat. Dépeinte comme forte, grande et masculine, certains récits la décrivent comme une cannibale qui pourchassait et tuait les hommes… rien n’est plus faux. Cela contribuait au mythe construit autour de leur personne pour craindre ses guerrières ou les diaboliser.

La principale différence entre une Amazone et une Valkyrie, hormis leurs origines géographique et mythologiques, réside dans le fait que les Valkyries était avant-tout des esprits guerriers féminins. Esprits qui pouvaient donc en toute logique se « réincarner » ou être invoqué lors des combats pour prendre possession du combattant et lui apporter son énergie sur le champ de bataille. D’autres récits leur donne un rôle plus passif: en servant Odin, le dieu principal de la mythologie nordique, elles transportaient les héros tombés du champ de bataille à Valhalla, où ils seraient divertis par les Valkyries d’Odin jusqu’à ce qu’ils soient prêts à se battre à nouveau à Ragnarok.

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