Epilogue – Un autre sang – L’AMAZONE

Epilogue – L’Amazone – Tome

Le réveil (L’Amazone, Epilogue)

– « Bon, ça suffit. Tu te réveilles maintenant… Tu nous as fait assez peur. Allez Elise ! Debout, bon sang ! Je sens ta présence, donc tu fais l’effort de te réveiller. »

Cette voix me résonnait dans la tête. Tout était pourtant calme autour de moi. Tout m’incitait à dormir et me reposer.

– « Allez ! Debout ! »
Cette voix… Je maudissais Kenza. Que me voulait-elle ? Dans un état de sommeil léger, j’entendis certains bruits autour de moi. Des battements de cœur, des froissements de draps. Une odeur d’alcool désinfectant et presque de naphtaline me prit au nez. Je commençais à remuer. Des lueurs familières m’entouraient.

– « Tu as réussi à la contacter ? »
– « Oui, elle émerge », répondit Kenza à la voix.
– « Nous aurions peut-être dû la laisser dormir. C’est peut-être que son âme n’est pas prête… », lui répondit cette même voix que j’identifiais comme étant celle de Kayla, qui avait l’air tant préoccupée que j’avais eu du mal à la reconnaitre en premier lieu.

– « Non, elle est solide. Il est temps. J’écris à message à Alexis pour la prévenir. »

L’évocation de ce prénom me ramenait difficilement mais sûrement aux derniers évènements. Ainsi, j’étais encore vivante. La gorge tranchée d’Anya, la fausse trahison d’Ankara, ma blessure… oh mon dieu, cette lueur blanche ! Comment avaient-elles fait pour la vaincre sans que j’eusse le temps de les prévenir ? Je secouais doucement la tête en forçant sur mes traits du visage pour tenter d’ouvrir les yeux. Mes paupières semblaient faites de plomb.

– « Je sais que c’est dur mais il faut que tu fasses l’effort. »

– « J’essaie, j’essaie… et arrête d’hurler dans ma tête s’il te plait ! »
Kenza dut faire un mouvement qui la trahit car Kayla s’empressa de lui demander ce qu’il se passait.

–  « Elle va se réveiller. Elle nous entend et essaie de se manifester mais pour l’instant, elle râle car elle ne veut pas m’entendre dans sa tête… »

–  « Si la grenouille râle, c’est qu’elle va bien », soupira Kayla avec contentement.

–  « Elle me dit de te dire d’arrêter avec ce surnom débile », ricana Kenza.

–  « Elle est là, c’est le principal », dit Kayla en me pressant la main. Il me fallut quelques minutes supplémentaires pour pouvoir ouvrir les yeux. J’étais dans une salle de repos, sûrement dans notre clinique privée. La pièce contenait un peu d’équipement médical. Pas de monitoring lâchant des bips intermittents comme on le voit dans les séries TV. J’avais quelques perfusions sur moi mais rien ne paraissait dramatique. Ma bouche était pâteuse. Je me sentais un peu poisseuse même si par ma tenue légère, je savais qu’on avait dû me laver et panser mes plaies. Ma main effleura inconsciemment mon flanc. Il y avait un énorme pansement mais ce dernier était propre. Cela me tiraillait mais je ne souffrais pas.

– « La belle au bois dormant daigne enfin nous faire profiter de sa présence », ironisa Kayla, sans méchanceté.

Je voulus lui répondre sur le même ton mais ma gorge était incroyablement sèche. Je ne m’en rendis compte qu’au moment où je voulus parler. En guise de réplique, je partis sur une quinte de toux qui, pour le coup, réveilla certaines douleurs. Kenza, rapide comme l’éclair, avait déjà rempli un verre d’eau qu’elle me tendait, me laissant le temps de terminer cette quinte de toux.

– « Prends ton temps… », me dit-elle calmement.
Je repris doucement mon souffle et une fois que je fus sûre de ne pas m’étouffer, j’acceptais avec plaisir le verre tendu. L’eau était fraîche et je réalisais à ce moment l’intensité de la soif qui me tenaillait jusqu’ici. Je balayais la pièce du regard, tout en savourant cette eau. Des regards plus complices se dessinaient lorsque je croisais ceux de mes sœurs.

–  « On a vraiment gagné alors ? », dis-je d’une voix incertaine, plus pour moi, que pour elles.

–  « Oui », acquiesça Kayla, visiblement heureuse de me retrouver. « Tu en avais vraiment douté ? », reprit-elle sur un ton de plaisanterie.

–  « Que s’est-il passé après que j’ai perdu connaissance ? », m’enquis-je.
Kenza et Kayla échangèrent un regard énigmatique. Kenza se décida à prendre la parole.

–  « Une fois Anya hors-jeu, ses troupes étaient un peu perdues. Nos sœurs ont vite repris le dessus. Nous avons quelques dizaines de pertes au sein de nos rangs, de nombreuses blessées. Pour certaines, les blessures sont très graves. Sur les quelques cinq cents attaquantes que comptaient les rangs d’Anya, on pense que près de trois cents ont pris la fuite, blessées ou pas. Pour aller où ? On ne sait pas encore. Elles vont être chassées ou recrutées par les autres clans, c’était donc un geste désespéré de leur part. Plus d’une centaine sont mortes sur le champ de bataille et une autre centaine accepte de nous prêter allégeance. »

–  « Comment va-t-on convertir des guerrières qui nous ont attaquées et ne connaissent que la violence ? », m’inquiétai-je.

–  « Ça va être la lourde tâche de Belen et de certaines de nos sœurs. On a déjà eu à faire cela, mais pas en aussi grand nombre. Nous les inviterons à quitter le camp si nous avons le moindre doute sur leur loyauté. Pour l’instant, on règle le problème de place pour loger ces guerrières », expliqua Kayla d’un air las et peu convaincu.

–  « Mei-Wen… », murmurai-je.

–  « Oui, nous savons. Je l’ai vu à travers tes yeux », me confirma Kenza.

–  « Quand comptez-vous l’enterrer avec les autres ? », tentai-je de m’intéresser pour oublier ma peine.
Kayla regarda de nouveau Kenza.

–  « Elise, cela fait vingt jours que tu es inconsciente. Nos sœurs sont déjà enterrées », m’annonça Kenza avec précaution.

–  « Quoi ? », hoquetai-je de surprise.

–  « Nous sommes aussi étonnée que toi du temps qu’il t’a fallu pour te rétablir. J’étais la seule à croire en ta survie, tant tu étais dans un mauvais état. Kayla et certaines d’entre nous t’ont soignée et veillée jours et nuits. Tu nous as fait complications chirurgicales sur infections. Ton âme de guerrière essayait de reprendre le dessus mais tu étais vraiment mal en point. Tu as vraiment eu du mal à guérir », dit-elle désolée.

Je tentais de digérer cette information. Moi qui pensais avoir des facultés physiques hors du commun depuis ma nouvelle condition.

– « Gab et Patrick », dis-je dans un sursaut.
– « Je leur ai envoyé des messages vocaux en utilisant ta voix enregistrée. Je leur ai fait croire que tu partais en road trip pendant trois semaines avec nous et je leur ai envoyé depuis ton adresse email des montages vidéos de toi en civile et de paysages pris en photo ces derniers mois pour illustrer mes propos. Ils ne se doutent de rien mais commencent à trouver le temps long. Sur leur dernier message, ils demandent tes dispos pour avoir une vraie conversation téléphonique. »

J’essayais de me calmer, vaguement soulagée. Mais également heureuse car je réalisais que j’allais les revoir. Ce combat n’était pas ma fin. Enfin, quand même : vingt jours…

–  « Les filles vont être contentes de savoir que tu es enfin réveillée », me dit Kayla dans un sourire.

–  « Merci de m’avoir sauvée… et veillée. Au fait, et cette lueur blanche qui est arrivée à la fin du combat. Vous avez réussi à l’avoir ? »

Pour la troisième fois depuis mon réveil, Kayla se tourna en silence vers Kenza en attendant que cette dernière trouve les réponses justes. Kenza cette fois fixa son regard au sol pour trouver une formulation adéquate. Cela n’augurait rien de bon.

– « Il y avait une lueur blanche. Elle est toujours là. Et je savais depuis le jour où tu l’as croisée dans les bois qu’elle était chez nous. J’espère que tu ne m’en voudras pas d’avoir gardé le silence, mais je l’avais promis à Alexis et d’autres. Ce n’était pas un sniper d’Anya et cette lueur ne te veut aucun mal. Mais c’est à Alexis de t’en dire plus. »

Soucieuse et quelque peu contrariée, j’acquiesçais malgré moi et essayais de passer de nouveau à autre chose.

–  « Bon, je vais attendre qu’on veuille bien m’en dire plus. Est-ce qu’on peut au moins évoquer ce qu’il s’est passé avec Ankara ? Parce que c’est tout de même un sacré dossier ! »

–  « Je te passe la main sur ce sujet, Kayla. Tu sais ce que j’en pense », dit Kenza avec une moue entendue, en se levant de sa chance pour se caler debout, contre le mur en face de moi, les bras croisés.

–  « Oh, il n’y a plus grand chose à dire sur ce qu’elle a fait. C’était périlleux, osé, complètement fou mais certaines d’entre nous s’accordent pour dire qu’il fallait prendre les devants face à Anya pour mettre fin à ses plans. Megan est d’accord avec moi sur le fait que sa stratégie était bonne. Cela n’a pas dû être facile pour elle de jouer double jeu au contact de cette malade mentale et le tout sans que nos voltigeuses s’en rendent compte. Nous sommes également d’accord avec Kenza, Alexis et d’autres sur le fait que nous avons tout de même perdu de nombreuses sœurs dans cette manœuvre et que nous avons failli te perdre par la même occasion. Alexis lui a pardonné ce plan, ainsi que les mots durs qu’elle a eus avec elle pour convaincre Anya de sa loyauté jusqu’au dernier moment. C’est ce que nous devons retenir. Cela ne t’aidera peut-être pas à lui pardonner dans l’immédiat, mais sache que c’est elle qui a tenu à te porter à bout de bras depuis le champ de bataille jusqu’à notre hôpital. Elle avait plus d’énergie que nous et s’est chargée de le faire avec diligence pour te donner les meilleures chances de survie. »

–  « mmmhh »
Ce fut tout ce que je pus dire tant j’étais dubitative quant à cette initiative. Il est vrai que je n’avais pas senti de traitrise ou de malveillance à son égard quand elle s’adressait à Alexis sur le champ de bataille. Mais pourquoi s’était-elle portée volontaire pour jouer ce double jeu alors qu’elle avait tant de mal à se faire à la vie du camp ? Une part de moi pensait qu’il y avait une part de véracité derrière certains reproches formulés.

– « Elle ne voulait juste pas attendre que ce combat se déroule au moment où Elena et Gwen commenceraient à perdre sérieusement leurs dons. »

Je hochai la tête, toujours sans grande conviction.

–  « Quand vais-je pouvoir sortir ? », enchainai-je, désireuse de changer une nouvelle fois de sujet.

–  « Alexis ne devrait plus tarder. Elle voudra t’évaluer avant que le chirurgien du clan ne te donne le go. Tu la connais : elle préférera que tu restes un peu plus longtemps pour te reposer, même s’il te donne son accord », me répondit Kenza.
Je levai les yeux, ne reconnaissant que trop bien ce trait. Mais je n’éprouvais ni colère ni réel agacement. J’étais après tout contente de pouvoir toutes les revoir.

–  « Que fait-elle d’ailleurs ? Je m’attendais à ce qu’elle nous rejoigne plus vite que ça en lisant ton message… », s’inquiéta Kayla.

–  « Elle échange pour la énième fois avec le Conseil des Alphas. Elle doit encore être en ligne avec eux. Ils ont rendu leur verdict ce matin. Ils nient toute implication dans l’attaque d’Anya mais pour autant ne trouvent pas légitime la mise à mort de cette dernière par notre clan. Alexis leur a rappelé qu’ils devaient se préparer logiquement à une telle attaque dans la mesure où elle leur avait fait part des menaces reçues. C’est leur manque d’implication dans la justice qui devait nous être rendue qui nous a amené à cette situation. Ils ont crié au scandale face à de telles accusations de la part d’Alexis et continuent encore de pinailler sur des détails. Mais ils cherchent surtout à étouffer l’affaire », expliqua avec lassitude et mépris Kenza.

–  « Quel toupet ! Ils n’attendaient que ça ! Qu’Anya fasse le sale boulot à leur place. Ils n’ont jamais accepté l’intronisation d’Alexis et le fait qu’elle échappe à leurs règles… Et maintenant ils osent ne pas respecter les règles fondamentales qu’ils ont toujours voulu instaurer. Alexis doit être folle de rage… », pesta Kayla.

Je restais silencieuse. Les rares fois où ce Conseil avait été évoqué devant moi, cela n’avait jamais été fait en des termes très glorieux. Je ne pouvais que ressentir également du mépris pour ces personnes, dont j’ignorais encore beaucoup à leur sujet.
Soudain le visage de Kenza s’obscurcit. De petits coups nets portés à la porte de ma chambre se firent entendre.

– « Alexis ? », interrogea Kayla.
Kenza secoua sa tête, l’air sombre. Elle se décolla du mur et avança l’air mauvais vers la porte avant de l’ouvrir.

La passe d’armes (L’Amazone, Epilogue)

–  « Ne fais pas cette tête, je me doute que tu as vu ma venue. Et si tu ne l’as pas fait, tu ne peux t’en prendre qu’à toi-même », agressa cette voix que je reconnaissais aisément.

–  « Elle vient à peine de réveiller. Comment as-tu su ? Et surtout pourquoi venir la voir aussi tôt ? », questionna Kenza avec la même agressivité.

–  « J’étais avec Alexis quand elle a reçu ce message. Quitte à devoir lui parler, autant le faire maintenant avant que toute la clique ne se ramène, ce qui s’applique également à vous. » Kenza se tendit et son corps était prêt à répondre à cet affront de la plus violente des manières.

– « Kenza ! C’est bon… Il va bien falloir qu’on se recroise au camp de toute façon ».

Elle était toujours dissimulée par la porte entrouverte par Kenza mais je sentais la suffisance émaner d’Ankara. Kayla me questionna du regard pour savoir si je désirais vraiment m’entretenir avec elle. Kenza, qui n’avait pas décroché son regard d’acier d’Ankara, n’avait pas vu mon signe d’assentiment mais l’avait lu. A contre cœur, elle recula pour ouvrir la porte et laisser passer la visiteuse. Ankara passa devant elle avec dédain, sans plus lui accorder d’attention. Son regard se porta directement sur Kayla.

– « Est-ce que tu peux également nous laisser s’il te plait ? », demanda Ankara d’un ton sans réplique.

Il n’avait jamais été question de formuler cette demande autrement que sous un ordre déguisé de formules de politesse.

– « On ne va sûrement pas te laisser seule avec elle », grogna Kenza.
– « De quoi tu as peur, Trelawney ? Si jamais j’avais voulu m’en débarrasser, je n’aurais eu qu’à ralentir le rythme de ma course jusqu’à l’hosto. Ou pire : courir à votre rythme… »
Un grognement léger se fit entendre de Kenza, ce qui fit sourire de malice Ankara et poussa Kayla à se lever pour s’interposer.

– « Ça ira, Kenza. Je sais que vous êtes à côté. »
Je l’incitais au calme. C’était bien la seule chose que je pouvais faire à mon réveil. Ankara s’assit à la place désormais vacante de Kayla.

–  « Je reste à côté. De toute façon, je dors à coté depuis ton arrivée. Je ne repars à la maison que pour nourrir les chats et gérer les messages pour ton père et ton frère. Si tu as besoin de quoique ce soit, envoie-moi un message comme tu sais si bien le faire », finit-elle dans un clin d’œil sérieux et entendu.

–  « C’est touchant », ironisa Ankara.

–  « Cela suffit ! », tonnai-je.
Mon regard soutenait calmement mais fermement celui d’Ankara. Sans nous quitter du regard, nous entendîmes nos deux sœurs sortir.

–  « Je suppose que tu es venue pour que je te remercie de m’avoir transportée à l’hôpital après la fausse trahison que tu as menée ? », grinçai-je.

–  « Même pas… le coup de pied que je t’ai envoyé gratuitement au visage pour donner le change à Anya suffit largement à mon égo et ma satisfaction personnelle. » Mes molaires se frottèrent nerveusement à l’évocation de cet « incident ».

– « Trêve de formalités et de politesses. Je n’ai pas beaucoup de temps avant qu’Alexis n’arrive, et les discours pleins d’émotions n’ont jamais été mon fort. Il y a presque trois semaines, tu as fait quelque chose que je ne pense pas être un jour capable de faire, même si j’étais voltigeuse. Tu as sauté sur la lame pour épargner Alexis. Notre Alpha. Je suis encore surprise par ton dévouement. Je ne te demanderai pas d’approuver ce que j’ai fait pour pousser Anya à sortir de sa planque, car je me fous toujours de ton opinion. Je respecte aujourd’hui les capacités que Kenza et toi avaient acquises aussi rapidement, mais en ce qui te concerne, je n’accepterai jamais la chance dont tu bénéficies et dont tu ne te rends même pas compte. »

Je fus sur le point de protester pour comprendre ce qu’elle voulait dire, mais elle enchaîna sans prêter attention à ma confusion ou encore ma frustration.

– « Nous sommes toutes les deux dans le même bateau, avec le même capitaine et quasiment les mêmes conditions. Je ferai donc un effort à ton égard pour tolérer ta présence. Nous ne serons jamais amies, tu peux te retirer tout de suite cette idée farfelue de la tête. Mais tant que tu œuvreras pour le bien du clan et que je verrai toujours cette même ferveur au combat, je mettrai en sourdine mon animosité et ferai semblant. »

– « Autant d’émotions en si peu de mots, j’en chialerai presque », répliquai-je d’un ton grinçant. « Qu’est-ce que ça te fait d’être polie, Voldemort ? T’arrives à reprendre ton souffle ? »

Ankara me toisa d’un sourire en coin. J’étais incapable de savoir s’il s’agissait de moquerie, de respect pour continuer à lui tenir tête ou encore d’une promesse future de me le faire payer. Mon état de fatigue m’empêchait encore d’en lire plus à travers ses émotions.

– « Sur ce, je te laisse à ta semaine de thalasso. Contrairement à toi, certaines ont du pain sur la planche. Et tes deux gardes du corps vont s’impatienter. »

Elle se leva, me tourna le dos et sans une parole de plus, ouvrit la porte pour sortir de la chambre.
Kayla et Kenza firent leur entrée. Kayla se renseigna très vite sur le contenu de cet échange. Son ouïe développée lui avait restitué l’essentiel mais elle voulait confirmer ce qu’elle avait cru comprendre. Après lui avoir raconté, nous nous accordions unanimement sur le fait qu’Ankara ne changerait pas du jour au lendemain et que si j’avais le droit à un bonjour de temps à autre, je pouvais me considérer comme chanceuse. Elles m’incitèrent à faire une courte sieste avant l’arrivée d’Alexis, ce que j’acceptai avec plaisir.

Cette dernière arriva une heure plus tard, de fort méchante humeur, mais elle essaya de me le cacher car elle était heureuse de me revoir éveillée. Elle avait ouvert la porte sans frapper et en me voyant assise sur mon lit, s’empressa de faire les derniers pas menant à mon lit pour me prendre dans ses bras. Malgré la colère toujours présente que je ressentais en elle, je sentis une vague plus forte de tristesse et de soulagement tout balayer sur son passage. Je sentais ses larmes tomber sur mes cheveux même si elle faisait tout pour maitriser ses sanglots. Elle continua de me serrer ainsi jusqu’à ce qu’elle maitrise ses débordements de joie. Kenza et Kayla ne dirent rien qui puissent perturber ce moment ou le rendre inconvenant, ridicule.

–  « Alors, ce Conseil te donne du fil à retordre ? », entamai-je pour détendre l’atmosphère.

–  « On s’en moque du Conseil. Comment vas-tu ? »
Elle s’affairait déjà pour examiner par elle-même mon pansement sur le flanc.

–  « Cela tire encore mais je n’ai pas mal. Je ne comprends d’ailleurs toujours pas comment j’ai pu rester en sommeil aussi longtemps. »

–  « Il s’est passé plusieurs éléments bizarres te concernant pendant et après le combat. Mais d’abord, je tiens à te remercier encore pour avoir fait ce que tu fais. Jamais je n’attendrais que tu remettes ta vie en danger pour sauver la mienne, je n’accepte pas cette condition… » Je la coupai dans son élan.

– « Tu n’as pas à me remercier ou à me convaincre de ne plus le faire. C’est ma mission, c’est mon destin et je parle au nom de Kenza et du mien : nous serons toujours ravies de le faire car nous sommes programmées pour cela. »

Kenza acquiesça dans un sourire avec un air entendu.

– « Je sais mais je trouverais toujours cela injuste. »

– « Raconte-moi plutôt ce qu’il s’est passé d’inhabituel me concernant. »
Alexis chercha ses mots pendant que Kenza et Kayla échangèrent un regard lourd de sens. Cela devenait chez elles une habitude qui commençait à me déplaire sérieusement.

–  « Lors du combat, nous avons cru que tu avais finalisé ta connexion avec ton âme de guerrière. »

–  « Et ce n’est pas le cas, visiblement ? », l’incitai-je à poursuivre.

–  « Sur le moment, j’ai ressenti de la tristesse car cela ne pouvait signifier qu’une chose : la mort de Gwen. Mais elle est toujours vivante. Et surtout, tu as nommé cette entité. Delia. »

–  «Et?»

–  « Nous ne connaissons jamais le nom de nos âmes de guerrières car elles portent le nom de leur hôte du moment. Elles partagent leurs souvenirs, leur expérience, leur force, leurs dons… mais jamais un nom. Elles ne nous parlent qu’en nous montrant des images. »

Elle marqua un nouveau temps de pause pour choisir avec soin ses mots.

– « Dans la mesure où tu as fait l’expérience des réminiscences de combat de ta guerrière, Gwen et d’autres érudits qui se penchent sur ton cas pensent que tu as fait la rencontre d’une autre entité en toi. Cette Delia… »

Je ne montrais aucune émotion. Pas même l’incrédulité.

–  « Cette entité semble vouloir te protéger et être de notre côté. Mais de ce fait, nous devrons te monitorer pour savoir quand Delia réapparaitra et dans quelles conditions. »

–  « Mais c’est quoi cette histoire ? », finis-je par lâcher. « Combien de personnes antiques me hantent ? »

Toutes s’échangèrent un regard.

–  « Nous ne savons pas, mais nous continuons de chercher. Cependant, cela lève un point déplaisant pour toi, comme pour nous. Ton âme de guerrière ne s’est pas révélée lors de ce combat. De plus d’autres appelées sont arrivées pendant que tu étais ici. »

–  « Donc ? »

–  « Nous pensons que le combat d’Anya n’était pas celui pour lequel nous devons nous préparer. Un autre arrive, plus important, d’où le nombre de recrues qui continue d’affluer et de se manifester dans le monde. »
Je me décomposais sur place. Je n’avais toujours pas réussi à devenir une vraie voltigeuse, même si cela impliquait la mort de Gwen. J’étais toujours incomplète. Et le pire est que ce combat que j’avais tant redouté avec Anya n’était visiblement rien par rapport à celui qui approchait. Quelle était la menace cette fois ? Serons-nous prêtes à nous défendre ? Ne posant guère de question à la suite de cette révélation, Alexis crut qu’il était préférable de passer sur ce détail de taille.

–  « Un deuxième évènement aurait tendance à confirmer notre théorie concernant la bienveillance de Delia. »

–  « Un deuxième évènement ? »

–  « Disons que lorsque l’on t’a ramenée à l’hôpital et déshabillée après l’intervention pour te nettoyer, nous avons vu une marque sur ton épaule. Aucune d’entre nous ne l’avait vu avant sur toi. Nous en avons donc déduit qu’elle était apparue pendant le combat. » Instinctivement, je portais ma main droite sur mon épaule pour tâter en espérant sentir quelque chose.

–  « Tu ne la verras pas comme cela, elle est un peu plus bas, près de ton omoplate. Le plus important est son symbole. Cela représente nettement un croissant de lune, comme une partie de notre emblème », poursuivit Alexis.

–  « Tu crois vraiment qu’elle a envoyé ce signe pour nous montrer sa complaisance ? Elle aurait pu me le dire directement si c’était le cas, non ? Après tout, elle m’a dit son nom. » Le regard d’Alexis trahissait le cheminement de ses pensées. Ce que je venais de dire prenait sens et remettait en question son hypothèse.

–  « Et Kenza a-t-elle également reçu une marque ? »

–  « Non », répondit Alexis, presque désolée de me laisser seule avec cette nouvelle anomalie. « Mais votre lueur diffère par sa couleur. »

–  « … Et est-ce que l’autre lueur blanche a une marque de ce genre ? »

Ma question était sortie assez abruptement mais une partie de moi leur en voulait de m’avoir cachée cette lueur. Comment avaient-elles pu me mentir sur ce sujet ? Me laisser croire à une menace ? Et par la même occasion, me faire douter de moi-même et de mes dons lorsque je leur ai parlé de cette lueur ? Nous étions à la veille d’un combat important et elle m’avait laissé croire à cette menace.

–  « … Une marque est effectivement apparue mais elle n’a pas le même symbole. Elle est apparue le jour du combat chez cette lueur… écoute, je comprends ta colère mais j’avais des raisons de te cacher cela à ton arrivée. »

–  « Car ça date de mon arrivée ? », m’exclamai-je en colère.
Mes membres se mirent à trembler de rage. Kenza et Kayla se mirent en garde au cas où je me laisserai déborder par mes émotions.

– « Calme-toi. Il faut que tu te calmes. Je vais tout t’expliquer… »

La passation (L’Amazone, Epilogue)

Quelques jours s’étaient passé depuis sa visite à Elise. Elle l’avait revue deux ou trois fois jusqu’à sa sortie d’hôpital faite ce jour mais les relations étaient de nouveau tendues. Pourquoi était-ce si compliquée alors qu’Elise était si enthousiaste et de bonne volonté ? A croire que les évènements se chargeaient de tout envenimer !

La vie reprenait son cours au sein du clan, mais les enterrements groupés qu’elle avait dû organiser un peu plus de trois semaines auparavant l’avaient chamboulée au plus profond d’elle-même. Cela s’apparentait à une tuerie massive et elle n’était pas habituée. Il fallait aujourd’hui avancer, continuer l’intégration des nouvelles recrues d’Anya, des nouvelles appelées… gérer également le conflit latent qui prenait de l’ampleur avec le Conseil. Car le grand combat n’avait pas encore eu lieu et elle en mesurait l’impact que cela aura sur ces troupes. Ce soir, elle s’était repassée en boucle, sans aucune raison apparente, les échanges qu’elle avait eus avec le clan de Jeff. Toutes ces théories qui avaient élaborées pour expliquer le pourquoi de ces lueurs. Et si l’attaque d’Anya n’avait été supportée par le Conseil que parce qu’elle leur permettrait de s’approprier Kenza, Elise et potentiellement Aaron quand ils apprendront pour lui. Il n’y avait pas d’autres explications pour le refus du Conseil de rendre justice et de transgresser leurs propres lois. Avec un peu de recul, elle les imaginait capables de juger Anya à la fin de cette guerre sur la base de son comportement et de son attaque non légitime. Ils auraient pu aisément la priver de ses troupes ainsi que de ses nouvelles prisonnières à l’issue de ce procès.

Le dernier échange qui lui revenait en tête était celui qu’elle venait d’avoir plus tôt dans la journée. Ce sujet déplaisant qu’elle se devait de traiter au plus vite en tant qu’Alpha dans une telle situation. Avant de se poser pesamment dans son canapé, elle avait ouvert une bouteille de vin et pris un verre à pied dans sa cuisine. Elle avait besoin de se relaxer. Elle but un premier verre rapidement. Après réflexion, elle se dit qu’il valait mieux en finir avec ce sujet déprimant ce soir même. Elle pourrait se reposer ensuite. Elle se leva et alla chercher dans la salle des communications son ordinateur portable qu’elle ouvrit devant elle. Elle enchaîna habillement de ses doigts de taper son mot de passe du moment et ouvrit le logiciel pour enregistrer une vidéo. Avant de la lancer, elle se força à prendre trois grandes bouffées d’air afin de retrouver un semblant de sérénité. Le message serait assez difficile en soi pour ses sœurs et elle.

– « Elena, Gwen, Kenza, Megan, Kayla, Elise, Belen, Sarah, Ankara et toutes mes sœurs de combat, si vous recevez ce message, c’est que je ne suis plus parmi vous. Je suis désolée de vous avoir fait défaut, de vous avoir déçues ou de ne pas avoir réussi à vous mener plus loin. J’espère de tout cœur que je n’aurais pas entraîné dans ma chute l’une d’entre vous. Ces années avec vous ont été les plus fortes, les plus enrichissantes et les plus heureuses. Dans mon âme, ce départ sera toujours trop tôt par rapport à ce que je voulais accomplir mais dans mon cœur, je suis en paix avec la fin que me présentera mon destin. Mon devoir aujourd’hui est de vous donner le nom de la prochaine Alpha qui me succèdera. Je ne préfère pas attendre que d’autres entités supérieures fassent un choix par défaut pour moi. Je sais les challenges qui nous attendent, qui vous attendent et cette personne s’impose à mes yeux pour savoir vous guider sur ce chemin où vous attendront au tournant la douleur et la mort. Restez soudées et acceptez mon choix. Son nom est … »

Une heure plus tôt, elle essayait de convaincre cette même personne d’accepter la succession et le lourd héritage qu’incluait cette position. Elle l’avait invitée à la rejoindre loin des oreilles indiscrètes dans sa bibliothèque souterraine. Le refus avait été catégorique.

– « Tu ne comprends pas ? Avec les évènements du moment et le peu que nous connaissons de leurs lueurs, cette attaque n’était rien comparé à ce qui va nous arriver. Un tsunami arrive et je ne serai sûrement plus des vôtres pour les guider. Je ferai mon maximum pour rester à vos côtés, mais si je n’y arrive pas, c’est que ma méthode n’était pas la bonne. Et elles auront besoin d’un stratège pour reprendre le flambeau. »

Incrédule et en colère, la prochaine élue secoua la tête. Ses yeux se brouillaient de larmes. Comment osait-elle lui demander cela ? Elle laissa libre cours à sa colère. Alexis réussit à la calmer et lui faire entendre raison.

– « Elles dépendront de toi comme tu dépendras d’elles… Je te connais et je sais à quel point ce que je te demande est difficile. Tu risques d’essuyer des refus, mais elles te suivront. J’en suis sûre … Je sais qui tu es vraiment et ce dont tu es capable. »

Après quarante minutes de discussion, elle avait réussi à la convaincre. Enfin pas vraiment… mais elle ne refusait plus catégoriquement cette charge.

Elle finissait son message et le programma pour être envoyé à toutes ses sœurs, si elle ne donnait pas signe de vie toutes les 24 heures.
Le cœur lourd, elle repartit dans son salon pour se nicher dans le canapé et se servir un autre verre de vin. Elle avait fait son devoir. Elle savait qu’elle avait fait le bon choix. Il ne lui restait plus qu’à rester en vie le plus longtemps possible pour continuer de guider les troupes et ne pas imposer trop vite ce fardeau à la prochaine Alpha. Fardeau qui lui avait fait perdre beaucoup de choses au nom du devoir. Elle repensait à Jeff et ce qu’aurait pu être leurs vies s’ils n’avaient pas hérité de cette destinée. Devait-elle lui préparer également une vidéo ? Elle prit une nouvelle gorgée et s’autorisa à verser quelques larmes dans la plus stricte intimité. Comme elle le faisait toujours.

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L’Amazone – Roman Fantasy – Faits et fiction

Est-ce que les Amazones ont vraiment existé?

Des fouilles archéologiques menées en Russie et Kazakhstan ont révélé en 2012 la présence de tombes de femmes guerrières. Ces dernières étaient enterrées avec leurs armes, bijoux … et pour certaines d’entre elles, des centaines de pointes de flèches. Après expertise, ces tombes ont pu être datées (entre 600 et 200 avant Jésus-Christ). Les autres objets et inscriptions retrouvés à l’intérieur semblent laisser penser que ces guerrières étaient également des cavalières.

D’autres recherches ont permis de mettre en évidence l’existence de ces cavalières peintes sur des céramiques avec un arc d’une forme très caractéristique. Des similitudes génétiques ont également été établies entre les restes humains retrouvés dans les tombes et certaines filles nées dans des familles mongoles. Les premières étaient dotées d’une belle chevelure blonde, caractéristique typique des Amazones alors que les peuples mongoles affichaient en grande partie une chevelure noire.

Quelle est l’origine du mot Amazone?

On ne compte plus le nombre d’interprétation faites du mot Amazone.

La plus connue reste “privée de mamelle”, “sans sein” qui entraina le mythe de l’amazone se coupant le sein droit pour mieux tirer à l’arc. Pour ceux qui prennent la peine de découper le mot en Ama (signifiant “avec”) et Zôné (qui signifie “ceinture”), il est plus facile de faire le lien avec un de leurs attributs les plus connus: la ceinture des amazones, symbole militaire pour certains, don d’Arès pour d’autres.

En caucasien, Amazone signifie “qui ne mange pas de pain”, faisant ainsi référence aux sociétés nomades non agricoles.

Pour finir, les amazones étaient également appelées Oiorpata, ce qui signifie “tueuses d’hommes”.

A vous de choisir celle qui vous parle le plus 😉

Comment s’appelle la chef des Amazones?

La chef des amazones est en réalité une reine. Plusieurs de ces reines guerrières se sont distinguées dans la mythologie grecque, à travers les récits faits sur leurs héros. Parmi les plus connues, nous pouvons citer: Andromaché, Antianara (reine des Amazones après la mort de Penthésilée), Antiope (reine des Amazones enlevée par Thésée, mère d’Hippolyte), Clétè (reine des Amazones qui rejoint Penthésilée à Troie), Hippolytè (ou Hippolyte, reine des Amazones qui détenait la ceinture d’Arès), Lysippé (reine des Amazones qui a fondé Thémiscyra), Marpesia, Penthésilée (reine des Amazones qui combattit contre Achille à Troie) et Thalestris (reine des Amazones à l’époque d’Alexandre le Grand).


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